Des Seychelles à Conkouati : renforcer la protection marine
Dans cette interview, on part dans un voyage au cœur de la protection marine à travers le témoignage de Dixième Jacques Moukala, Chef du secteur marin du Parc National de Conkouati Douli. De retour d’une formation immersive aux Seychelles, il partage les enseignements, les outils et les pratiques novatrices qui renforcent aujourd’hui la capacité collective à protéger les écosystèmes côtiers et marins du Congo.
English version below


Pouvez-vous nous parler en quelques mots de la formation à laquelle vous avez participé aux Seychelles ?
J’ai participé à une formation immersive de deux semaines aux Seychelles, organisée par le Parc National de Conkouati Douli en partenariat avec la Seychelles Parks and Gardens Authority (SPGA). Cette mission avait pour objectif de renforcer mes compétences en matière de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) et de gestion des aires marines protégées, grâce à une immersion complète dans les pratiques, les outils et les dynamiques opérationnelles mis en œuvre par la SPGA.
Quels étaient les principaux thèmes abordés pendant ces deux semaines ?
Au cours de cette formation, nous avons étudié l’organisation hiérarchique et opérationnelle de la surveillance marine et découvert l’usage de technologies clés, telles qu’EarthRanger, les drones et les systèmes AIS, un système mondial d'échange automatique de messages standardisés entre bateaux à partir d'émetteurs-récepteurs de signaux radio et GPS. Nous avons également travaillé sur la planification et la conduite des patrouilles maritimes, abordé la gestion des principales menaces comme la pêche illégale, la pollution ou l’ancrage non autorisé, et analysé les mécanismes de coordination entre agences ainsi que les partenariats multi-acteurs. Une attention particulière a aussi été portée à la formation, à la motivation et à la responsabilisation des équipes de terrain.
Qu’avez-vous découvert ou appris de nouveau sur la gestion des aires marines protégées ?
J’ai découvert l’importance d’une approche véritablement intégrée, alliant innovation technologique, mobilisation communautaire, gouvernance structurée et valorisation du travail des agents. J’ai également compris que la gestion efficace des aires marines protégées (AMP) repose sur une planification rigoureuse, une forte réactivité opérationnelle et une collaboration étroite entre les institutions publiques, les ONGs, les communautés locales et le secteur privé.
Y a-t-il un moment ou une activité de la formation qui vous a particulièrement marqué ?
La visite de la salle de contrôle EarthRanger de la base AMP de Sainte-Anne a été l’un des moments les plus marquants pour moi. Le fait de pouvoir observer en temps réel la cartographie des menaces, les données croisées provenant des patrouilles et les alertes transmises par les communautés m’a permis de mesurer pleinement la valeur ajoutée de cet outil pour renforcer la surveillance et appuyer la prise de décision stratégique.
En quoi cette expérience vous a-t-elle inspiré dans votre travail au Parc National de Conkouati Douli ?
Cette expérience m’a inspirée à renforcer la coordination entre les acteurs locaux, à structurer davantage la planification des patrouilles et à promouvoir un usage plus systématique des données pour orienter nos interventions. Elle m’a également confortée dans la conviction que la motivation des équipes dépend autant de la reconnaissance et de la formation continue que de leur implication active dans les processus décisionnels.
Quelles bonnes pratiques ou idées aimeriez-vous adapter ou mettre en œuvre ici à Conkouati ?
J’aimerais notamment maximiser l’utilisation de l’outil EarthRanger dans la collecte de nos données marines et améliorer leur exploitation. Je souhaite également mettre en place une planification hebdomadaire accompagnée de briefings quotidiens pour renforcer la réactivité des équipes, tout en développant des collaborations étroites avec les pêcheurs et les opérateurs touristiques afin de consolider la surveillance communautaire. Enfin, la mise en place de formations croisées entre agents de différents profils me semble essentielle pour favoriser la polyvalence et renforcer la cohérence des interventions.
Quels sont, selon vous, les plus grands défis pour la protection marine dans le parc national aujourd’hui ?
Les défis majeurs résident aujourd’hui dans le manque de moyens logistiques permettant d’assurer une surveillance continue, dans la difficulté à détecter et sanctionner efficacement la pêche illégale, et dans une coordination entre acteurs encore perfectible. S’y ajoute la nécessité de renforcer la formation et la motivation des agents de terrain, qui restent au cœur du dispositif de protection.
Que diriez-vous à vos collègues ou aux jeunes du parc qui aimeraient un jour suivre votre parcours ?
Je leur dirais de rester engagés, courageux et rigoureux, car chaque mission et chaque patrouille constituent une occasion d’apprendre et d’évoluer. La formation, l’ouverture à d’autres expériences et la passion pour la nature sont des éléments essentiels pour progresser dans ce métier exigeant, mais profondément porteur de sens.
Un mot de la fin : comment résumeriez-vous cette expérience en une phrase ?
Je résumerais cette expérience comme une immersion à la fois inspirante et structurante, qui m’a permis de transformer des observations concrètes en véritables leviers d’action pour renforcer la protection marine au Congo.
© 2025-UE/NaturAfrica Afrique centrale/Ollivier Girard

From Seychelles to Conkouati: boosting marine protection
In this interview, we take you behind the scenes of marine conservation through the inspiring experience of Dixième Jacques Moukala, Marine Sector Chief at Conkouati Douli National Park. Fresh from an immersive training in Seychelles, he shares key insights, innovative tools and best practices that could help strengthen collective efforts to protect Congo’s coastal and marine ecosystems.
Maryleine Louemba, Communication and marketing assistant & Dixième Jacques Moukala, Marine Sector Chief


Could you briefly tell us about the training you attended in Seychelles?
I took part in a two-week immersive training in Seychelles, organized by the Conkouati Douli National Park in partnership with the Seychelles Parks and Gardens Authority (SPGA). The purpose of this mission was to strengthen my skills in combating illegal, unreported and unregulated (IUU) fishing and managing marine protected areas, through full immersion in the practices, tools and operational systems implemented by SPGA.
What were the main themes addressed during these two weeks?
During the training, we studied the hierarchical and operational organization of marine surveillance and explored key technologies such as EarthRanger, drones, and AIS systems — a global system for automatically exchanging standardized messages between vessels using radio-signal and GPS transceivers. We also worked on the planning and execution of maritime patrols, tackled major threats such as illegal fishing, pollution or unauthorized anchoring, and analyzed coordination mechanisms between agencies as well as multi-stakeholder partnerships. Special attention was also given to training, motivating and empowering field teams.
What new insights did you gain about marine protected area management?
I discovered the importance of a truly integrated approach combining technological innovation, community engagement, structured governance and recognition of the work done by field agents. I also realized that effective management of marine protected areas (MPAs) relies on rigorous planning, strong operational responsiveness, and close collaboration between public institutions, NGOs, local communities and the private sector.
Was there a moment or activity during the training that particularly stood out to you?
Visiting the EarthRanger control room at the Sainte-Anne MPA base was one of the highlights for me. Being able to observe threat mapping in real time, cross-referenced patrol data, and alerts transmitted by communities allowed me to fully understand the added value of this tool for strengthening surveillance and supporting strategic decision-making.
How has this experience inspired your work at Conkouati Douli National Park?
This experience inspired me to reinforce coordination among local stakeholders, further structure patrol planning, and promote a more systematic use of data to guide our interventions. It also strengthened my conviction that team motivation depends as much on recognition and continuous training as on their active involvement in decision-making processes.
Which best practices or ideas would you like to adapt or implement here in Conkouati?
I would particularly like to maximize the use of EarthRanger for collecting and analyzing our marine data. I also hope to establish weekly planning with daily briefings to improve team responsiveness, while developing closer collaborations with fishermen and tourism operators to enhance community-based surveillance. Lastly, implementing cross-training between agents with different profiles seems essential to foster versatility and strengthen the coherence of field operations.
In your opinion, what are the biggest challenges for marine protection in the national park today?
The major challenges today include limited logistical resources to ensure continuous surveillance, difficulty in detecting and efficiently sanctioning illegal fishing, and coordination among actors that still needs to be improved. Added to this is the need to strengthen training and motivation of field agents, who remain at the heart of protection efforts.
What would you say to your colleagues or young people in the park who would like to follow a path similar to yours?
I would encourage them to remain committed, courageous and rigorous, as every mission and every patrol is an opportunity to learn and grow. Training, openness to new experiences, and passion for nature are essential elements to progress in this demanding yet deeply meaningful profession.
One last word: how would you summarize this experience in one sentence?
I would summarize this experience as an inspiring and structuring immersion that allowed me to turn concrete observations into real levers for strengthening marine protection in Congo.
